Projet RUSKURD
Russes et Kurdes au Moyen-Orient (fin 19e-21e siècles)
Coordinateur : Etienne Peyrat, Maître de conférences en histoire, Sciences Po Lille, IRHiS
A l’heure où la Russie a fait un retour remarqué dans la géopolitique du Moyen-Orient, l’objectif de ce projet est d’étudier une des dimensions les plus persistantes et paradoxales de cette politique, sa relation avec les Kurdes.
Dès le 19e siècle, alors que l’Empire tsariste conquiert le Caucase et s’impose comme un acteur majeur des rivalités entre grandes puissances au Moyen-Orient, ses élites militaires puis diplomatiques et intellectuelles, identifient les Kurdes comme un pion essentiel sur un échiquier régional instable et contesté.
Depuis, la Russie – et l’Union soviétique – n’ont cessé de voir dans les Kurdes un allié potentiel, instrumentalisable pour ses capacités militaires, mais aussi redouté. La création par l’Empire ottoman des brigades kurdes Hamidiye après 1891, la participation des Kurdes à la Première Guerre mondiale, ou leur rôle disputé au cours de la Guerre froide constituent autant de jalons dans une histoire au cœur des rapports de force régionaux.
Cet intérêt stratégique a eu comme pendant le développement d’une école orientaliste active, développant la kurdologie comme champ de recherche à part entière et contribuant à la constitution d’identités kurdes entre Russie et Moyen-Orient. Cette constitution d’identités se nourrit de migrations et circulations entre empires et aires géographiques, des déportations staliniennes de 1937 jusqu’aux circulations d’activistes du second vingtième siècle.
Ce sont ces différentes dimensions, militaires, intellectuelles, culturelles et politiques que ce projet de recherche se propose d’étudier et de restituer, contribuant à une meilleure compréhension des connexions régionales en Eurasie.
https://ruskurd.hypotheses.org/
https://ruskurd.hypotheses.org/
Membres :
Masha Cerovic, Maîtresse de conférences, EHESS, CERCEC
Adnan Çelik, Doctorant, EHESS, CETOBAC
Nodar Mosaki, Chercheur, Institut d’orientalisme, Académie des sciences de Russie
Alisa Shablovskaia, Doctorante, Sciences Po Paris-Sorbonne Nouvelle
Projet DATAWAR
Comment les données façonnent notre vision de la guerre ? L'impact des pratiques scientifiques de l'analyse quantitative des conflits sur les perceptions de la violence politique par les ONG, les institutions politiques et les médias
Comment les représentations de la violence sont-elles influencées par l'« agence des données », c'est-à-dire les pratiques sociales de collecte et d'analyse des données dans les études quantitatives des conflits armés ?
Un grand nombre des interprétations causales des conflits armés ont bénéficié de la vérification empirique par les outils de la recherche quantitative, et ceci bien avant les débats actuels sur les « Big Data ». Les premières grandes bases de données « mesurant » les conflits ont été construites après l’émergence du comportementalisme dans les sciences sociales au cours des années 1960. Depuis lors, les publications mobilisant des grands ensembles de données ont contribué à renforcer et à spécifier de nouvelles propositions théoriques telles que le déclin des conflits interétatiques depuis 1990 ou la thèse de la « paix démocratique ». En outre, institutions politiques, ONG et les médias s’appuient de plus en plus sur les résultats des études quantitatives pour « prédire » les conflits armés et développer leurs positions analytiques et normatives.
Cependant, au sein de la communauté scientifique, la validité des résultats produits par la recherche quantitative positiviste sur les conflits est de plus en plus remise en question. Les critiques visent, entre autres, la fiabilité des données collectées, la qualité des modèles mathématiques utilisés dans l’analyse statistique, et les pratiques de dissémination pratiquées par les grandes revues scientifiques.
Mais comment les résultats de la recherche quantitative sur les conflits influencent-ils réellement les perceptions des praticiens à l'égard des conflits armés ? La littérature en science politique existante analyse principalement les manières dont les chiffres sont instrumentalisés par les gouvernements dans le contrôle les populations et la numérisation du champ de bataille. Par exemple, les données quantitatives en matière de sécurité internationale sont utilisées pour la persuasion, la (dé)politisation et la standardisation. En revanche, des enquêtes approfondies visant la réception des pratiques de la production scientifique, y compris les logiques internes de la collecte des données et de leur analyse et publication, sont largement absentes ce ces recherches existantes.
La principale question de recherche de ce projet est donc la suivante : comment l'« agence » des données quantitatives sur les conflits, comprise ici comme l'ensemble des pratiques scientifiques associées à la génération, au traitement, à l'analyse et à la dissémination scientifique de grands ensembles de données sur les conflits armés, influence-t-elle les représentations et les attentes liées à la guerre dans les médias, les institutions politiques et les ONG ?
DATAWAR réalisera la première étude systématique des pratiques scientifiques dans le domaine des études quantitatives sur les conflits ainsi que leur impact sur les représentations de la guerre par les praticiens, couvrant le cycle de vie complet des données sur les conflits, à commencer par leur collecte et analyse jusqu’à leur réception et interprétation par les journalistes, les représentants d'ONG et les officiels de trois grands pays activement impliqués dans la gestion des crises internationales : la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.
Un grand nombre des interprétations causales des conflits armés ont bénéficié de la vérification empirique par les outils de la recherche quantitative, et ceci bien avant les débats actuels sur les « Big Data ». Les premières grandes bases de données « mesurant » les conflits ont été construites après l’émergence du comportementalisme dans les sciences sociales au cours des années 1960. Depuis lors, les publications mobilisant des grands ensembles de données ont contribué à renforcer et à spécifier de nouvelles propositions théoriques telles que le déclin des conflits interétatiques depuis 1990 ou la thèse de la « paix démocratique ». En outre, institutions politiques, ONG et les médias s’appuient de plus en plus sur les résultats des études quantitatives pour « prédire » les conflits armés et développer leurs positions analytiques et normatives.
Cependant, au sein de la communauté scientifique, la validité des résultats produits par la recherche quantitative positiviste sur les conflits est de plus en plus remise en question. Les critiques visent, entre autres, la fiabilité des données collectées, la qualité des modèles mathématiques utilisés dans l’analyse statistique, et les pratiques de dissémination pratiquées par les grandes revues scientifiques.
Mais comment les résultats de la recherche quantitative sur les conflits influencent-ils réellement les perceptions des praticiens à l'égard des conflits armés ? La littérature en science politique existante analyse principalement les manières dont les chiffres sont instrumentalisés par les gouvernements dans le contrôle les populations et la numérisation du champ de bataille. Par exemple, les données quantitatives en matière de sécurité internationale sont utilisées pour la persuasion, la (dé)politisation et la standardisation. En revanche, des enquêtes approfondies visant la réception des pratiques de la production scientifique, y compris les logiques internes de la collecte des données et de leur analyse et publication, sont largement absentes ce ces recherches existantes.
La principale question de recherche de ce projet est donc la suivante : comment l'« agence » des données quantitatives sur les conflits, comprise ici comme l'ensemble des pratiques scientifiques associées à la génération, au traitement, à l'analyse et à la dissémination scientifique de grands ensembles de données sur les conflits armés, influence-t-elle les représentations et les attentes liées à la guerre dans les médias, les institutions politiques et les ONG ?
DATAWAR réalisera la première étude systématique des pratiques scientifiques dans le domaine des études quantitatives sur les conflits ainsi que leur impact sur les représentations de la guerre par les praticiens, couvrant le cycle de vie complet des données sur les conflits, à commencer par leur collecte et analyse jusqu’à leur réception et interprétation par les journalistes, les représentants d'ONG et les officiels de trois grands pays activement impliqués dans la gestion des crises internationales : la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.
Le projet explore l'hypothèse selon laquelle la production scientifique dans les études quantitatives de conflit est moins propulsée par l'innovation théorique que par la « politique des données », c'est-à-dire la disponibilité, la réputation et la malléabilité mathématique des observations quantifiées des conflits. En conséquence, nous anticipons que les interprétations des conflits développées par les praticiens sont soumises à des perceptions erronées causées par la nature des données disponibles, par le type de modèles mathématiques utilisés pour analyser et potentiellement « prédire » les conflits, et par le recours trop restreint aux arguments théoriques disponibles.
Membres du consortium du projet :
Frédéric Ramel, Professeur des universités en science politique, Sciences Po Paris, CERI - Coordinateur du projet
Sami Makki, Maître de conférences en science politique, Sciences Po Lille, CERAPS
Eric Sangar, Maître de conférences en science politique, Sciences Po Lille, CERAPS - Coordinateur de work package
Thierry Balzacq, Professeur des universités en science politique, Sciences Po Paris, CERI
Ariel Colonomos, Directeur de recherche au CNRS, Sciences Po Paris, CERI - Coordinateur de work package
Marine Guillaume, Maître de conférences en science politique, Ecole Polytechnique, LinX
Thomas Lindemann, Professeur des universités en science politique, Ecole Polytechnique, LinX - Coordinateur de work package
Thomas Lindemann, Professeur des universités en science politique, Ecole Polytechnique, LinX - Coordinateur de work package